Le Temps dans la guerre contre la “désinformation russe”

par

Ivo Rens

5 janvier 2017

 

L’OTAN et l’Union européenne s’inquiètent toujours plus de l’influence croissante de la Russie dans le monde de l’information. Mais jusqu’ici, ces instances ont été impuissantes à remédier à ce que les dirigeants occidentaux tiennent pour une fâcheuse dégradation de l’opinion publique.

 

“Tandis que le modèle journalistique traditionnel des pays d’Europe occidentale traverse de graves difficultés économiques, les médias russes gagnent toujours plus de terrain. A la botte du Kremlin et régis par une organisation verticale quasi militaire, ils proposent un nouveau type de journalisme qui s’inscrit dans une stratégie générale de désinformation de l’opinion publique.” C’est par cette mise en contexte que débute un article intitulé “la nouvelle désinformation russe” paru dans Le Temps du 17 juin 2016, et dû au talent de Luc Maffre, politologue.

Pour cet auteur, il est évident que l’ennemi russe a succédé à l’ennemi soviétique auquel il emprunte ses méthodes de désinformation, mutatis mutandis. Le succès des nouveaux médias russes s’expliquerait par leur habile utilisation de fausses rumeurs, par la dérégulation du marché de l’information due à la Toile et par le recours à des personnalités charismatiques comme Julian Assange et Edward Snowden.

Dans un Editorial et un article de fond parus dans Le Temps du 28 décembre 2016, Frédéric Koller surenchérit sur cette thématique. Citant un responsable de l’OTAN, il affirme que, “avec des médias traditionnels, les réseaux sociaux, des SMS et des trolls, la Russie, comme l’Etat islamique, tente de décrédibiliser les processus démocratiques.” Selon Frédéricc Koller, il ne s’agirait pas seulement de désinformation, mais d’une guerre hybride, “mélange d’opérations de terrain, de piratage informatique et de désinformation” en partie pilotée par le Kremlin, dans le but d’affaiblir l’Union européenne et l’OTAN en divisant leurs membres afin d’avantager les intérêts de la Russie. On serait donc bien en présence d’une stratégie militaire.

Les médias russes nommément visés sont Russia Today (RT) et Sputnik. Selon Koller et Maffre le Kremlin miserait, en Occident, sur le concours des partis et mouvances d’extrême droite et pourrait être intervenu aux Etats-Unis dans l’élection inattendue de Donald Trump. L’OTAN et l’Union européenne auraient bien tenté d’amorcer des stratégies de résistance, mais sans grand succès en raison des pièges inhérents à la contre-propagande. En définitive, conclut Frédéric Koller, “face à la propagande pilotée par le Kremlin avec de très gros moyens, on doit s’en remettre à la presse libre. C’est notre force et notre faiblesse”…

 

La faiblesse à laquelle songe l’auteur serait due à la crise du “modèle journalistique traditionnel” pour reprendre l’expression de Luc Maffre. Mais en réalité, elle est autrement plus profonde qu’il le croit car elle réside dans la servilité des Etats membres tant de l’UE que de l’OTAN et de nombre de journalistes occidentaux envers la ligne du politiquement correct que définissent les Etats-Unis et que propagent notamment les grandes agences de presse occidentales.

Frédéric Koller et Le Temps en sont des exemples frappants. Voilà un journaliste suisse s’exprimant dans un quotidien suisse qui, à aucun moment, ne songe à tirer avantage de sa situation de ressortissant d’un pays neutre n’appartenant ni à l’OTAN, ni à l’UE, bien qu’enclavé dans l’une et l’autre, pour prendre du champ par rapport au politiquement correct de ces deux instances.

Comme Luc Maffre, Frédéric Koller identifie implicitement la Russie à la défunte Union soviétique et fait l’impasse sur l’histoire des relations internationales intervenue depuis 1991. Or, n’est-ce pas les Etats-Unis et l’OTAN qui ont violé la Charte des Nations Unies et le droit international en entrant en guerre contre la Yougoslavie en 1999 ? Les Etats-Unis n’ont-il pas violé le droit international dans pratiquement tous les conflits qu’ils ont déclenchés depuis lors, notamment contre l’Irak en 2003 et contre la Lybie en 2011 ? Avec d’autres Etats membres de l’OTAN et du Golfe persique, n’ont-ils pas contrevenu au droit international dans les événements de Syrie en appuyant les “rebelles” et en les armant ? N’ont-ils pas fomenté le coup d’Etat en Ukraine en février 2014 ? N’ont-ils pas invoqué leur vocation exceptionnelle à diriger un monde unipolaire ? Pourquoi donc faire de la Russie le bouc émissaire ?

Quand des journaux se permettent, dans toutes circonstances, de ne présenter à leurs lecteurs qu’une version des événements, celle des puissances dominantes du moment, et de la ressasser nonobstant les témoignages concordants qui la contredisent, il n’est pas étonnant que leurs lecteurs les abandonnent progressivement. Et l’on ne prend pas grand risque en pronostiquant que leurs annonceurs les suivront tôt ou tard !

Au surplus, il y a, nous semble-t-il, à tout le moins une coupable légèreté à invoquer la stratégie militaire et la guerre de la désinformation prétendument menée par la Russie dans un contexte de relations internationales tendues au point que, depuis les présidences de G.W Bush et de Barack Obama, un conflit nucléaire apparaît malheureusement de moins en moins “impensable”.

 

 

 

 

 

 

 

De la servilité comme passion politique

par Ivo Rens

14 décembre 2016

 

Depuis quelques semaines, en ce mois de décembre 2016, la presse française décrit en termes apocalyptiques la défaite de la “rébellion” à Alep.

Prenons l’exemple du quotidien parisien Le Monde du 14 décembre. Il ne lui consacre pas moins de six articles aux titres quasiment désespérés tels Alep, tombeau du droit international, de l’ONU, du minimum de décence et d’humanité et Alep ou “l’honneur perdu” de l’Occident. La veille ou l’avant-veille, la radio France-Info avait ouvert une rubrique intitulée Comment sauver Alep ?

Tentons de décrypter ce type de messages sinon d’informations, sans perdre de vue les indicibles souffrances qu’endurent les populations qui en sont les victimes, pour ne pas parler des combattants eux-mêmes.

Tout d’abord le destinataire non averti de ces messages peut être amené à croire que la ville d’Alep tout entière serait sur le point de passer sous le contrôle de terroristes. S’il prête attention, il comprendra que tel serait le sort non point de la ville tout entière, mais seulement de sa partie orientale qui comportait prétendument entre 250’000 et 300’000 habitants, en réalité beaucoup moins.

Mais curieusement, cette même presse ne lui parle pratiquement jamais des quelque 1’500’000 habitants du reste de cette grande ville, toujours sous le contrôle du “régime”, c’est-à-dire du Gouvernement de la République arabe syrienne, qui subissent depuis quatre ans les attaques meurtrières de la “rébellion”.

Il est indéniable que ces événements consacrent un échec cuisant de l’ONU qui a été conçue pour prévenir les guerres, mais qui n’a réussi à éviter cette guerre-là. Sont-ils pour autant “le tombeau du droit international” ? Il est permis d’en douter d’autant que c’est grâce au concours de ses alliés au sens du droit international public, la Russie et l’Iran, que le gouvernement syrien a pu réduire les milices qui s’étaient emparées, voici quatre ans, de la partie orientale de cette ville.

Par delà ces questions formelles, ce qui ressort de ces messages, c’est le parti-pris du quotidien Le Monde comme de France-Info et leur ralliement à la cause de la “rébellion”. A priori, la chose est d’autant plus étonnante que cette dernière est indéniablement dominée par la branche syrienne d’Al-Qaïda, un label en matière de terrorisme. En vérité, ce parti-pris est celui non seulement de ces deux organes de presse, comme celui de la majorité des organes de presse occidentaux, mais surtout celui des Etats-Unis et de leurs alliés de l’OTAN dont les interventions en Syrie violent impunément, depuis des années, le droit international public.

Pour Washington en proie aux prétentions hégémoniques des prétendus “néoconservateurs”, le renversement du président Bachar El Assad fait partie d’un plan global visant à changer le régime d’un certain nombre de pays, comme on l’a vu en Yougoslavie, en Afghanistan, en Irak et en Lybie.

Que les Etats-Unis aient réussi à enrôler dans le versant syrien de cette entreprise l’Arabie saoudite et le Katar, s’explique par la conjonction de l’hégémonisme des uns, du prosélytisme sunnite des autres et des appétits pétroliers de tous.

Comment se fait-il que les Etats occidentaux, et en particulier la France, aient été amenés à se joindre à pareille malaventure ?- voilà qui est plus singulier. Plusieurs auteurs ont relaté l’histoire tumultueuse des relations franco-syriennes qui expliquent en partie cette option.*

Mais il y a aussi une composante psychologique paradoxale qui pousse une ci-devant grande puissance à adhérer aux prétentions les plus extrêmes de la nouvelle puissance dominante, et même à surenchérir jusqu’à faire de sa propre servilité une passion politique. D’où le ton emphatique des titres de presse que nous avons cités.

Il serait temps que les dirigeants Européens et les Américains renoncent à l’appui, pas seulement politique, qu’ils ont généreusement offert aux prétendus “opposants modérés” de Syrie, le masque politiquement correct des terroristes syriens. Quelles que soient ses imperfections, la République arabe syrienne est le seul Etat arabe laïc auquel participent les représentants de plusieurs confessions musulmanes et chrétiennes.

 

 

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– Pichon, Frédéric, Syrie. Pourquoi l’Occident s’est trompé, Editions du Rocher, Monaco, 2014, 132 pages.

– Chesnot, Christian et Malbrunot, Georges, Les chemins de Damas, Robert Laffont, Paris, 2014, 386 pages.

– Baud, Jacques, Terrorisme, Mensonges politiques et stratégies fatales de l’Occident, Editions du Rocher, Monaco, 2016, 423 pages.

 

Les guerres hors-la-loi: comment les pays-membres de l’OTAN sabotent l’ONU

Une chronique de Daniele Ganser
par Johannes Irsiegler
Source : http://www.zeit-fragen.ch/fr.html
Horizons et débats
12 décembre 2016
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Daniele Ganser est historien et chercheur pour la paix, spécialisé en politique internationale et histoire contemporaine de 1945 à nos jours. Il est également fondateur du «Swiss Institute for Peace and Energy Research» (SIPER) à Bâle. Il a considérablement contribué, par ses précédentes publications, à une nécessaire relecture de l’histoire de l’Occident depuis 1945. Son nouveau livre «Les guerres hors-la-loi: comment les pays-membres de l’OTAN sabotent l’ONU. Une chronique des évènements de Cuba jusqu’à la Syrie» y apporte une nouvelle contribution substantielle.
Pour commencer, Daniele Ganser fait état de certaines remarques personnelles: parallèlement au modèle représenté par ses parents, les faits déterminants de son engagement politique ont été les grandes manifestations contre la guerre ayant eu lieu en 2003, juste avant que les Etats-Unis et leurs alliés n’attaquent l’Irak. Puis s’ensuivit la guerre d’Irak avec les terribles conséquences engendrées jusqu’à présent. Daniele Ganser décrit son accablement à ce moment-là, et entraine ainsi le lecteur sur un plan aussi bien émotionnel que thématique. D’aucuns se souviendront aussi avec exactitude de cette époque de mensonges et de l’arrogance des bellicistes tels que Tony Blair et George Bush.
D’emblée, Daniele Ganser s’empare d’un problème actuel: la crise des réfugiés. Il formule clairement le problème: les principaux éléments déclencheurs des flux de réfugiés ont été avant tout les guerres provoquées par les Etats-membres de l’OTAN et leurs alliés au Proche-Orient, des conflits qu’ils dirigent encore. Cette réflexion évidente est diluée dans les actualités de nos médias alignés, quand elle n’est pas totalement passée sous silence. Selon Ganser, ces guerres sont illégales dans leur ensemble: «Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et la création de l’ONU, organisation de paix, il y a eu interdiction formelle de toute guerre.» Au cours des cinquante dernières années, il y a eu aussi d’autres Etats belligérants, mais c’est un fait avéré que les Etats-membres de l’OTAN, sous la conduite des Etats-Unis, «ont initié, au cours des 70 dernières années, la majorité des guerres illégales, et s’en sont sortis à chaque fois en totale impunité».
Daniele Ganser, cependant, s’investit en faveur de l’ONU et de son idée de base, simple et claire: les guerres sont hors-la-loi. Il n’existe que deux exceptions à l’interdiction de guerre en vigueur dans le monde entier: le droit d’un pays de se défendre contre une attaque de l’extérieur, ainsi que la guerre menée contre un pays sur mandat officiel du Conseil de Sécurité de l’ONU. C’est la base du vivre-ensemble civilisé sur cette planète. Cette interdiction de violence de l’ONU doit être respectée et renforcée. Aujourd’hui, on doit imposer plus que jamais cette idée fondamentale dans les discussions générales traitant de la guerre et de la paix. Dans nos nations occidentales, les médias soumis à l’OTAN la balaient beaucoup trop volontiers sous le tapis. A ce propos, Ganser répond avec brio au reproche récurrent et toujours plus présent, fait à l’ONU, de son inefficacité et de son inadaptation à l’actualité: «Ce livre démontre que le manque d’efficacité de l’ONU ne réside pas dans son système, mais qu’il est dû au refus individuel de ses membres agissant parfois de façon déloyale et sabotent l’action de l’ONU par leurs mensonges au Conseil de Sécurité et à l’Assemblée générale.» Selon Ganser, toute réforme de l’ONU n’incluant pas cette problématique du mensonge, serait à long terme vouée à l’échec.
Après ces considérations de fond sur l’ONU, suivent des réflexions sur l’OTAN et les Etats-Unis. Daniele Ganser y exprime crûment un secret de Polichinelle connu de tous depuis longtemps: l’OTAN est l’instrument utilisé par les oligarques américains afin d’accéder à la réalisation de leur hégémonie sur notre planète.
Le principal chapitre abordé ensuite dans le livre est une chronique détaillée des guerres hors-la-loi et des putschs ourdis par des Etats-membres de l’OTAN contre des gouvernements démocratiquement élus. Cela commence par la chute du Premier ministre iranien Mossadegh en 1953. Aux yeux des Britanniques qui avaient alors la mainmise sur les recettes pétrolifères du pays, son seul «crime» avait été d’exiger une plus grande part de ces mêmes recettes afin qu’elles puissent profiter aux plus pauvres dans la population. Le putsch fomenté contre Mossadegh peut être considéré, comme le dit Michael Lüders, comme le «péché originel de l’Occident». De nos jours encore, nous ressentons les conséquences de cette politique ignoble sur un plan moral.
On trouve ensuite des chapitres traitant des guerres contre le Guatemala en 1954, l’Egypte en 1956, Cuba en 1961, le Viêt-Nam en 1964, le Nicaragua en 1981, la Serbie en 1999, l’Afghanistan en 2001, l’Irak en 2003, la Libye en 2011, l’Ukraine en 2014, le Yémen en 2015 et la Syrie depuis 2011 jusqu’à maintenant. Chaque chapitre est conçu séparément et peut être lu de même. Cela conviendrait aussi parfaitement à l’enseignement de l’histoire dans les écoles, et comme base de cours d’histoire contemporaine dans les universités.
Les responsables de l’OTAN aux Etats-Unis et en Europe ont donc beaucoup de sang sur les mains. Afin d’endormir les populations, on a invoqué, selon les vieilles façons impérialistes, des raisons humanitaires. Cependant, tout comme aujourd’hui dans le cas de la «guerre contre le terrorisme», c’était toujours une question de domination mondiale et de matières premières dans ces guerres. Ganser fait un bilan dévastateur de ces conflits: des régions entières sont déstabilisées, des vagues de réfugiés déferlent, de plus en plus d’attentats terroristes, une réduction des droits civils et l’instauration de l’Etat fouineur. Conclusion: la «guerre contre le terrorisme» a échoué et il faut y mettre fin.
La séduisante analyse de Daniele Ganser peut être résumée par la citation suivante: «L’OTAN n’est pas une force de sécurité et de stabilité, mais un danger pour la paix universelle.»
Daniele Ganser nous indique aussi ce que chacun d’entre nous peut faire pour remettre à nouveau en vigueur les principes de base de l’ONU, et pour encourager le vivre-ensemble pacifique des peuples.
Pour la Suisse et l’Autriche, par exemple, il recommande que ces pays reviennent à leur neutralité et qu’ils tournent le dos au Partenariat pour la Paix de l’OTAN – ou pour être plus précis, au «Partenariat pour la guerre». En Suisse, les citoyens pourraient demander la sortie de leur pays du PpP grâce à une votation populaire.
Dans tous les pays, cependant, la population pacifiste a des cartes en main. Ganser encourage ainsi à une plus forte interconnexion des mouvements pacifistes américains et européens. «La coopération du mouvement pacifiste européen avec le mouvement pacifiste aux Etats-Unis est à juste titre très importante parce qu’elle seule est capable de réformer pacifiquement l’empire américain de l’intérieur.» Le simple citoyen peut se documenter en lisant les sources d’information indépendantes et des livres et former sa propre opinion. C’est un des bienfaits d’Internet que nous n’ayons plus à nous baser uniquement sur les reportages des courtisans de l’OTAN dans nos médias alignés.
Daniele Ganser voit également une contribution à la paix dans l’exploitation des sources d’énergie renouvelables, étant donné que la plupart des guerres sont axées sur la lutte pour les réserves de pétrole et de gaz naturel et que, grâce aux ressources énergétiques renouvelables nous deviendrions plus indépendants vis-à-vis de ces produits. Enfin, l’une des demandes les plus importantes de Ganser est le renforcement du droit international et de l’interdiction de l’usage de la force inscrite dans la Charte des Nations Unies: «La Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des Droits de l’homme font partie des documents historiques les plus précieux, ils devraient nous servir à tous d’orientation pour le XXIe siècle.» L’adresse mondialement fédératrice «Nous, peuples des Nations Unies» doit être redynamisée, car elle exprime la précieuse pensée que l’humanité est une seule et même famille.
Lorsqu’on termine la lecture de ce livre, malgré la description des horreurs et des souffrances, il n’y a pas de place pour la résignation. Daniele Ganser formule, en effet, une pensée essentielle: les guerres sanglantes contredisent profondément la nature sociale de l’individu, car: «[…] au plus profond de leur cœur, les hommes s’aiment les uns les autres». Merci, Daniele Ganser, pour cet excellent livre que nous recommandons chaleureusement à toute personne intéressée par la politique. Le fait qu’il occupe déjà la première place sur la liste de best-sellers suisses des ouvrages spécialisés, est un signal des plus encourageants.     •
Ganser, Daniele, Illegale Kriege – Wie Nato-Länder die Uno sabotieren. Eine Chronik von Kuba bis Syrien. Zürich 2016, ISBN 978-3-280-05631-8

Extrait de Daniele Ganser, Illegale Kriege…, p. 330 et ss.

La Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des Droits de l’homme sont parmi les documents historiques les plus précieux, ils devaient être pour nous tous la base de l’orientation au XXIe siècle. Je ne peux que conseiller à tous de lire ces deux documents et d’y réfléchir. Déjà lorsque j’étais étudiant, j’avais commandé au service documentation des Nations Unies le texte de la Déclaration des Droits de l’homme, que j’avais affiché comme un poster sur le mur de ma chambre. «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité», souligne la Déclaration des Droits de l’homme, acceptée à l’unanimité par l’Assemblée générale de l’ONU le 10 décembre 1948. «Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne». (Article 3) et «Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction» (Article 18).
Il est vrai, bien sûr, que la Charte des Nations Unies et les Droits de l’homme sont chaque jour mis à mal. Dans certains cas, comme cela a été exposé plus haut, on a même «utilisé» ces deux documents l’un contre l’autre lorsqu’en 2011, par exemple, au nom des Droits de l’homme, une guerre a été menée contre la Libye, violant par là même la Charte des Nations Unies. Ces problèmes demeureront aussi à l’avenir et ne doivent pas être ignorés. Mais l’attention doit être attirée en même temps sur le fait que dans les très nombreux pays où les droits de l’homme et la Charte des Nations Unies étaient respectés, cela a toujours mené vers l’essor des sociétés en question.
Les objectifs de l’ONU ont été par ailleurs renforcés. Ainsi, le 25 septembre 2015, quand, lors d’un sommet de l’ONU, les chefs d’Etat et de gouvernement ont signé les 17 «Sustainable Development Goals» (SDG). Les Etats-membres de l’ONU s’y sont engagés à réduire la pauvreté, la faim et la discrimination des femmes et à développer les ressources énergétiques renouvelables. Avant tout cependant, les Etats se sont de nouveau engagés à empêcher toutes formes de violence, car la paix et la stabilité sont les conditions essentielles pour la réalisation d’un développement durable.
«La Suisse a un intérêt vital à ce que, dans les relations internationales, le droit prime sur la violence et non l’inverse», a déclaré l’ancienne conseillère fédérale suisse Micheline Calmy-Rey. Elle avait par là pleinement raison, car de petits pays comme la Suisse ne veulent pas que le monde dérive vers la guerre et le chaos. Nous devons respecter la loi, en prendre soin.

Selon The Times : l’Union européenne veut «corrompre» Bachar Al-Assad

par Khider C.

4 décembre 2016

Source :

http://www.algeriepatriotique.com/article/selon-times-l’union-européenne-veut-«corrompre»-bachar-al-assad

 

Le quotidien britannique The Times vient de révéler que l’Union européenne aurait proposé un deal au gouvernement syrien en contrepartie d’un important soutien financier. Citant de hauts fonctionnaires européens, la même source indique que la démarche de Bruxelles est motivée par deux considérations. L’UE veut, primo, garder à tout prix la Syrie sous influence occidentale à l’issue de la guerre et, secundo, éviter que l’Europe ne fasse davantage les frais de la crise.

Les hauts fonctionnaires européens qui se sont confiés au journal estiment, à ce propos, qu’«avec le cours pris par la bataille d’Alep, la demande formulée par les pays occidentaux se rapportant au départ de Bachar Al-Assad du pouvoir en Syrie n’est pas du tout réaliste». Aussi ne voient-ils d’autre solution que de négocier avec le chef de l’Etat syrien un accord «gagnant-gagnant». Pour s’assurer du succès de sa démarche, le Times mentionne que Bruxelles a convenu de laisser les Etats-Unis à l’écart de la négociation.

Afin de ne pas susciter l’ire de l’opposition syrienne, ou de ce qui en reste, le journal britannique nous apprend que la responsable de la politique étrangère de l’Union européenne, Federica Mogherini, a rencontré récemment ses principaux chefs afin de les convaincre de ne plus conditionner le règlement de la crise par le départ d’Al-Assad. Federica Mogherini leur a également promis d’être très généreuse avec eux. Y voyant un lien, The Times précise que la formulation de ces propositions coïncide avec l’adoption par le Conseil de sécurité de l’ONU de résolutions appelant à la mise en œuvre du processus de la «transition politique» en Syrie.

Une source de l’opposition syrienne a précisé au Times que Federica Mogherini leur a fait savoir que «l’UE a un plan pour régler la crise syrienne», ajoutant que, pour le moment, tout le monde y adhère et qu’il y a un gros paquet d’argent sur la table. Cependant, ajoute la source de l’opposition citée par The Times, les contours de ce plan prévoyant une période de transition non définie restent flous.

The Times mentionne seulement que le plan européen de sortie de crise évoque une redistribution du pouvoir dans les provinces syriennes et une fusion des éléments des groupes armés «modérés» dans des unités des forces locales de sécurité. En contrepartie d’un meilleur contrôle et d’un  fonctionnement plus démocratique, Bruxelles ne voit, par ailleurs, pas d’inconvénients à ce que les institutions gouvernementales de l’Etat central restent en place. S’agissant du sort du président syrien Bachar Al-Assad, il n’est évoqué nulle part.

Le journal explique seulement que les motivations sur lesquelles repose le plan de l’Union européenne font consensus à Bruxelles. Les dirigeants européens, souligne-t-il, ont changé radicalement leurs positions sur la Syrie en raison de leurs craintes de voir la crise des réfugiés s’aggraver au fil du temps. Dans les conditions actuellement, estiment-ils, la reconstruction de la Syrie est une priorité, même si beaucoup d’entre eux se disent gênés de voir Bachar Al-Assad rester au pouvoir.

 

 

 

 

La « guerre au terrorisme » par l’Occident est en même temps une guerre contre la vérité

par Paul Craig Roberts

Source :

http://arretsurinfo.ch/la-guerre-au-terrorisme-par-loccident-est-en-meme-temps-une-guerre-contre-la-verite/

Source originale :

https://i0.wp.com/arretsurinfo.ch/wp-content/uploads/2016/09/presse-Washington-Post.jpg

Traduction Petrus Lombard

 

La « guerre au terrorisme » est en même temps la guerre à la vérité. Depuis quinze ans – depuis le 11/9/2001 et les « armes de destruction massive » de Saddam Hussein et ses « liens avec al-Qaïda », les « armes nucléaires » iraniennes, l’usage de « gaz de combat » par Assad », les « mensonges » sans fin concernant Kadhafi, l’invasion de l’Ukraine par les Russes –, pour donner suite à leurs ordres du jour, les directions des soi-disant démocraties occidentales jugent essentiel de s’aligner résolument sur des mensonges. Les régimes occidentaux tentent à présent de discréditer ceux qui contestent leurs contrevérités.

Traités de pourvoyeurs de « fausses nouvelles », les services de presse russes sont attaqués par l’UE et la pressetituée occidentale. Restant fidèle aux ordres de son maître à Washington, l’UE est allée jusqu’à adopter une résolution contre tout média russe déviant de la ligne washingtonienne. Selon le Président russe Poutine, cette résolution est un « signe visible de la dégradation de la notion de démocratie dans la société occidentale. »

Comme l’avait prédit George Orwell, pour les régimes « démocratiques » occidentaux, dire la vérité est désormais un acte hostile. Venant de faire son apparition, un tout nouveau site web, propornot.com, fait le procès d’une liste de 200 sites Internet dont les informations et des opinions diffèrent de celles des médias de la pressetituée, qui favorisent l’ordre du jour des régimes de l’Ouest. Qui finance propornot.com,  la CIA, la National Endowment for Democracy, George Soros ?

Je suis fier de dire que paulcraigroberts.org est sur la liste.

Ce que nous voyons ici, c’est l’adoption par l’Ouest de la manière sioniste d’Israël de traiter les critiques. Quiconque s’oppose au traitement cruel et inhumain des Palestiniens par Israël, est fait passer pour un diabolique « antisémite ». À l’Ouest, ceux qui sont en désaccord avec les politiques meurtrières et téméraires officielles, sont fait passer pour de  diaboliques « agents russes ». Le président élu des États-Unis lui-même, a été qualifié d’« agent russe ».

Visant à faire passer ceux qui disent la vérité pour des propagandistes, cette magouille a des effets contre-productifs. Le discrédit des diseurs de vérités fournit un catalogue des sites Internet où l’on peut trouver de l’information fiable, et les lecteurs s’y précipitent en foule. De plus, la tentative de discréditer les diseurs de vérités montre que, ne supportant pas la vérité et les opinions diverses, les régimes occidentaux et leur pressetituée s’emploient à obliger les gens à prendre leurs mensonges intéressés pour des vérités.

Les régimes et les médias de l’Ouest n’ayant de toute évidence aucun respect à l’égard de la vérité, comment l’Occident peut-il être démocratique ?

Le rôle assigné à la pressetituée Washington Post est de promouvoir le narration mise en avant par Washington, selon lequel les médias alternatifs sont constitués d’agents russes. Craig Timberg, un compère du Washington Post qui semble dépourvu d’intégrité ou d’intelligence, et peut-être les deux, est l’auteur de la fausses information selon laquelle « deux équipes de chercheurs indépendants » – dont aucune n’est identifiée – ont constaté que les Russes exploitent ma crédulité, et celle de : CounterPunch, professeur Michel Chossudosky de Global Researh, Ron Paul, Lew Rockwell, Justin Raimondo et de 194 autres sites, dans le but d’aider « un candidat insurgé » (Trump) à « revendiquer la Maison Blanche ».

Notez le qualificatif employé pour Trump : « candidat insurgé ». Il vous dit tout ce que vous devez savoir.

Vous pouvez lire ici ce qui passe pour un « reportage sérieux » de la pressetituée Washington Post. Voyez aussi: http://www.alternet.org/media/washington-post-promotes-shadowy-website-accuses-200-publications-russian-propaganda-plants Glenn Greenwald, du site The Intercept, qui a évité d’une façon ou d’une autre d’être inclus dans les 200, vide ici son sac à propos de Timberg et du Washington Post.

Les régimes occidentaux sont à court de faux-fuyants. Depuis le régime Clinton, l’accumulation de crimes de guerre commis par les régimes occidentaux dépasse ceux de l’Allemagne nazie. Des millions de Musulmans ont été massacrés, désorganisés et dépossédés dans sept pays. Pas un seul criminel de guerre occidental n’a été tenu responsable.

Le méprisable Washington Post est un excellent apologiste pour ces criminels de guerre. La presse écrite et les médias télévisés occidentaux sont si fortement impliqués dans les pires crimes de guerre de l’histoire de l’humanité, que si jamais la justice arrivait à passer, la pressetituée sera au banc des accusés avec les Clinton, George W. Bush, Dick Cheney, Obama et leurs néocons agents secrets ou hommes de main, en fonction des besoins.

 

The Western War On Truth

Paul Craig Roberts

November 27, 2016

Source : http://www.paulcraigroberts.org/2016/11/27/the-western-war-on-truth-paul-craig-roberts/print/

 

The “war on terror” has simultaneously been a war on truth. For fifteen years—from 9/11 to Saddam Hussein’s “weapons of mass destruction” and “al Qaeda connections,” “Iranian nukes,” “Assad’s use of chemical weapons,” endless lies about Gadaffi, “Russian invasion of Ukraine”—the governments of the so-called Western democracies have found it essential to align themselves firmly with lies in order to pursue their agendas. Now these Western governments are attempting to discredit the truthtellers who challenge their lies.

Russian news services are under attack from the EU and Western presstitutes as purveyors of “fake news.” http://www.globalresearch.ca/moscow-accused-of-propagating-fake-news-eu-resolution-on-russian-propaganda/5558835 Abiding by its Washington master’s orders, the EU actually passed a resolution against Russian media for not following Washington’s line. Russian President Putin said that the resolution is a “visible sign of degradation of Western society’s idea of democracy.”

As George Orwell predicted, telling the truth is now regarded by Western “democratic” governments as a hostile act. A brand new website, propornot.com, has just made its appearance condemning a list of 200 Internet websites that provide news and views at variance with the presstitute media that serves the governments’ agendas. http://www.propornot.com/p/the-list.html Does propornot.com’s funding come from the CIA, the National Endowment for Democracy, George Soros?

I am proud to say that paulcraigroberts.org is on the list.

What we see here is the West adopting Zionist Israel’s way of dealing with critics. Anyone who objects to Israel’s cruel and inhuman treatment of Palestinians is demonized as “anti-semitic.” In the West those who disagree with the murderous and reckless policies of public officials are demonized as “Russian agents.” The president-elect of the United States himself has been designated a “Russian agent.”

This scheme to redefine truthtellers as propagandists has backfired. The effort to discredit truthtellers has instead produced a catalogue of websites where reliable information can be found, and readers are flocking to the sites on the list. Moreover, the effort to discredit truthtellers shows that Western governments and their presstitutes are intolerant of truth and diverse opinion and are committed to forcing people to accept self-serving government lies as truth.

Clearly, Western governments and Western media have no respect for truth, so how can the West possibly be democratic?

The presstitute Washington Post played its assigned role in the claim promoted by Washington that the alternative media consists of Russian agents. Craig Timberg, who appears devoid of integrity or intelligence, and perhaps both, is the WaPo stooge who reported the fake news that “two teams of independent researchers”—none of whom are identified—found that the Russians exploited my gullibility, that of CounterPunch, Professor Michel Chossudosky of Global Researh, Ron Paul, Lew Rockwell, Justin Raimondo and that of 194 other websites to help “an insurgent candidate” (Trump) “claim the White House.”

Note the term applied to Trump—“insurgent candidate.” That tells you all you need to know.

You can read here what passes as “reliable reporting” in the presstitute Washington Post: https://www.washingtonpost.com/business/economy/russian-propaganda-effort-helped-spread-fake-news-during-election-experts-say/2016/11/24/793903b6-8a40-4ca9-b712-716af66098fe_story.html

See also: http://www.alternet.org/media/washington-post-promotes-shadowy-website-accuses-200-publications-russian-propaganda-plants

Glenn Greenwald of The Intercept, which somehow escaped inclusion in The 200, unloads on Timberg and the Washington Post here: https://theintercept.com/2016/11/26/washington-post-disgracefully-promotes-a-mccarthyite-blacklist-from-a-new-hidden-and-very-shady-group/

Western governments are running out of excuses. Since the Clinton regime, the accumulation of war crimes committed by Western governments exceed those of Nazi Germany. Millions of Muslims have been slaughtered, dislocated, and dispossessed in seven countries. Not a single Western war criminal has been held accountable.

The despicable Washington Post is a prime apologist for these war criminals. The entire Western print and TV media is so heavily implicated in the worst war crimes in human history that, if justice ever happens, the presstitutes will stand in the dock with the Clintons, George W. Bush and Dick Cheney, Obama and their neocon operatives or handlers as the case may be.

 

Le Parlement européen adopte une résolution contre les médias russes !

 

Source: https://francais.rt.com/international/29485-union-europeenne-ne-supporte-plus-critique

23 nov. 2016

 

Le rapport du parlement européen lance de graves accusations contre des médias «russes», mais ce qu’il préconise pour lutter contre la «propagande du Kremlin» devrait bien plus inquiéter les citoyens. Voici les points essentiels de ce texte à charge.

La prose du parlement européen a de quoi décontenancer. Mais la question traitée est en définitive assez simple et pourrait même paraître à usage interne, fournissant des éléments de langage prêt à l’emploi : comment priver de liberté ceux que l’on accuse d’être les ennemis de la liberté, quand on se dit soi-même démocrate ?

Tel est le premier paragraphe du «rapport sur la communication stratégique de l’Union visant à contrer la propagande dirigée contre elle par des tiers», votée par le parlement européen ce 23 novembre 2016 et qui vise à contrer le «soft power» médiatique de la Russie :

«Considérant que l’Union européenne s’est engagée à ce que son action sur la scène internationale repose sur des principes tels que la démocratie, l’état de droit et le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ainsi que la liberté des médias, l’accès à l’information, la liberté d’expression et le pluralisme des médias, ce dernier principe pouvant cependant être limité dans une certaine mesure, comme le précise le droit international, notamment la convention européenne des droits de l’homme; que les acteurs tiers visant à discréditer l’Union ne partagent pas les mêmes valeurs».

 

L’Union européenne ne supporte plus qu’on la critique !

 

Le premier attendu de la résolution votée par le parlement européen annonce déjà la couleur et les contorsions rhétoriques que le lecteur devra décortiquer ensuite pour s’y retrouver. Et il lui faudra relire plusieurs fois certains paragraphes afin de discerner les cas où tel principe universel s’applique et dans quels cas son universalité se trouverait restreinte. Une universalité non-universelle, en quelque sorte, si l’on suit le texte.

Ainsi, dès les premières lignes, le citoyen européen assidu et à l’écoute de son parlement apprend que la liberté d’expression et le pluralisme des médias ne sont un luxe accordés qu’à ceux qui s’en montrent dignes et en font un usage raisonné, usage évalué, normé, soupesé et soumis au contrôle de ceux-là mêmes qui décident de qui est démocrate et de qui ne l’est pas.

En résumé : pas de démocratie pour les non-démocrates, pas de liberté pour les ennemis de la liberté : «les acteurs tiers» – traduire la Russie – qui ne «partagent pas les mêmes valeurs, ne sont donc pas autorisés à «discréditer l’Union». Embêtant lorsque l’on croit deviner qu’au nombre des valeurs requises figure apparemment la non-critique de l’Union européenne. De quoi avoir la migraine.

 

Syllogismes hasardeux

 

La prose de la résolution du parlement européen est un bijou de haute voltige rhétorique. Il y est question de droit international, de droits de l’homme. Pêle-mêle. Des grands principes – absolument respectables – qui ne sont utilisés qu’à sens unique, avec des accents qui parfois font penser à ceux d’un pervers narcissique, figure bien connue de la presse féminine, lequel est connu pour faire porter à sa victime la responsabilité de la violence qu’il lui fait subir. Et, bien qu’il soit difficile de ne pas passer pour l’agresseur en répliquant à l’agresseur, il est des formulations dans cette résolution qui sont des cas d’écoles d’inversion accusatoire.

Et ceux des eurodéputés qui ont voté le rapport incriminant sans ambages la Russie d’accuser cette dernière de vouloir entraîner un «découplage stratégique entre l’Union européenne et ses partenaires d’Amérique du Nord, de paralyser le processus décisionnel, de discréditer les institutions de l’Union et les partenariats transatlantiques – dont le rôle dans l’architecture de sécurité et économique européenne est reconnu – aux yeux et dans l’esprit des citoyens de l’Union et des pays voisins».

Pour le parlement européen, qui vit apparemment dans un autre monde, et s’autocongratule quitte à verser dans le déni de réalité, les traités commerciaux transnationaux ne souffre aucune controverse. Pas plus que le rôle de l’organisation militaire et politique de l’Alliance atlantique, sous l’égide des Etats-Unis, qui a procédé à une militarisation sans précédent depuis le dernier conflit mondial, de l’Europe de l’Est, ne saurait être questionné. Leur rôle est donc «reconnu». Et les «citoyens de l’Union» seraient donc unanimes.

 

Inversions accusatoires

 

Mais le léviathan-pervers-narcissique se posant tout de même en victime : «Le Kremlin a intensifié sa confrontation avec l’Union; […] le Kremlin a intensifié sa guerre de propagande, la Russie jouant un rôle plus actif dans l’environnement médiatique européen, afin de créer dans l’opinion publique européenne un soutien politique en faveur de l’action russe et de nuire à la cohérence de la politique étrangère de l’Union».

Alors qu’une partie significative des opinions publiques s’érigent contre les traités libre-échangistes tels que le TAFTA ou le CETA que l’opposition de la Wallonie a manqué de compromettre, que dès qu’un référendum est octroyé à la population, le résultat se révèle un camouflet pour l’Union européenne, à l’instar du Brexit, le parlement européen ne veut pas voir le phénomène lui-même mais ceux qui le relayerait. Le mécontentement des agriculteurs européens, frappés par les sanctions contre la Russie n’existent que parce que rapportés par des médias «de propagande» pour le parlement européen.

Ce dernier se déclarant, logiquement, «gravement préoccupé par le développement rapide de l’activité inspirée par le Kremlin en Europe, y compris la désinformation et la propagande visant à maintenir ou à accroître l’influence de la Russie et à affaiblir et à diviser l’Union européenne».

Se félicitant de ses «réussites»,  la résolution conseille à l’Union européenne de «mettre en avant un message positif axé sur ses succès, ses valeurs et ses principes, obtenus avec détermination et courage, et doit tenir un discours offensif et non défensif». Quitte même à recourir au système éducatif et universitaire.

 

Critiquer l’Union européenne, c’est être négationniste

 

Dénonçant une supposée «falsification de l’Histoire», mélangeant les négationnistes de tout poil, Daesh et les médias d’information – pardon de «désinformation», le parlement européen propose même de se mêler d’éducation, quitte à tout mélanger là aussi et à ressusciter la lutte contre le communisme (l’URSS a disparu en 1991) : «Il est nécessaire de sensibiliser aux crimes commis par les régimes communistes au moyen de campagnes publiques et dans les systèmes d’éducation […] pour contrer le discours du Kremlin», estiment ainsi ceux des eurodéputés qui ont voté pour la résolution. L’Union européenne se chargerait donc de dicter l’Histoire officielle et contester celle-ci serait du négationnisme.

La résolution, soit dit en passant, qui n’a pas force de loi, puisque, comme on le sait, le parlement européen n’a pas l’initiative des lois européennes, il n’est qu’une chambre d’enregistrement. Ils leur est permis d’interpeller la Commission, là où se trouve le vrai pouvoir, comme naguère, les parlements pouvaient, avec le tact dû, en appeler à tel ou tel despote éclairé. Le vrai pouvoir revenant à la commission européenne, cet aréopage d’inconnus, lesquels sont nommés et non pas élus. Le divorce entre les citoyens européens et l’Union européenne ainsi que le «déficit démocratique» des institutions, des problèmes reconnus par l’Union européenne elle-même, mais qui sont des sujets interdits pour les autres, restent toujours sur la table.

 

 

DES REVERS EN CASCADES pour la diplomatie française

par
Eric Denécé
04-11-2016
Centre Français de Recherche sur le Renseignement
21 boulevard Haussmann, 75009 Paris – France
Source : http://www.cf2r.org/fr/editorial-eric-denece-lst/une-lecon-meritee.php
et http://arretsurinfo.ch/des-revers-en-cascade/

Achat d’hélicoptères américains par la Pologne, rejet de la résolution française sur la Syrie à l’ONU, annulation de la visite de Vladimir Poutine à Paris : courant octobre, en quelques jours, notre diplomatie a connu trois revers majeurs, dont elle s’offusque, alors même qu’elle en porte l’entière responsabilité en raison de la politique erratique conduite par nos dirigeants.
Des revers en cascade

fabius-jean-marc-ayrault-francois-hollande-11-fevrier-2016-parisLaurent Fabius, Jean-Marc Ayrault, François Hollande. 11 février 2016 – Kenzo Tribouillard/AP/SIPA
La « trahison » polonaise n’a surpris que ceux qui ne s’intéressent pas à ce pays, car il est clair que la défense de ses intérêts nationaux – et sa défiance légitime à l’égard de son voisin russe – a toujours conduit Varsovie, depuis 1991, à privilégier l’alliance avec Washington plutôt que la solidarité européenne. On ne peut guère reprocher aux Polonais de nous l’avoir caché, car ils ont montré à plusieurs reprises, sans ambigüité aucune – notamment sur le dossier ukrainien – de quel côté leur cœur penchait. Mais nos politiques se bercent d’illusions. Non seulement ils n’ont pas voulu tenir compte de cette évidence, mais pire, ils se sont persuadés que notre refus de livrer deux navires amphibies Mistral à la marine Russe – sous la pression américaine – conduirait notre partenaire européen à choisir notre offre. Bien sûr, il n’en a rien été et l’annulation de la visite présidentielle à Varsovie comme les critiques du ministre des Affaires étrangères illustrent à quel point nos dirigeants ont pris leurs désirs pour la réalité… laquelle semble totalement leur échapper.

L’émotion de nos gouvernants au sujet de la bataille d’Alep en est un autre exemple. Leur « révolte » face aux « exactions » des forces russes et syriennes se fonde sur une vision totalement partiale de la situation, diffusée par les médias occidentaux.
A Alep, tout ceux qui connaissent la situation de terrain savent que les djihadistes d’Al-Nosrah pilonnent quotidiennement depuis plusieurs années les quartiers dont la population est restée fidèle au gouvernement de Damas[1] – ciblant prioritairement les quartiers chrétiens -, faisant de nombreuses victimes innocentes ; mais sans doute ces vies ont-elles moins de valeur que celles de ceux qui soutiennent les djihadistes. En effet, les témoins locaux confirment que tous les quartiers bombardés par les aviations russe et syrienne sont ceux dans lesquels la population a pris ouvertement parti pour les islamistes et où flotte ostensiblement le drapeau de Daech… ce que le médias ne nous montrent jamais[2].
Cette présentation totalement déformée de la réalité est insupportable. Pourtant elle est à l’origine des envolées lyriques et outragées de François Hollande et de Jean-Marc Ayrault, qui se sont même montrés menaçants à l’égard de Moscou. Voir nos autorités réagir à partir d’éléments aussi faux conduit à s’interroger sur leur connaissance réelle du dossier ou leur indépendance d’esprit vis-à-vis de Washington. De plus, ces positions de Matamore ne sont d’aucun effet. Les dirigeants français ont peut être l’illusion d’être des acteurs entendus et écoutés ; mais il n’en est rien. Ils sont aussi insignifiants qu’inaudibles. Notre proposition de résolution à l’ONU a été rejetée et nous ne sommes même plus invités aux négociations internationales sur la Syrie à Genève.

En toute logique, devant l’hostilité manifestée à son égard par nos gouvernants, les menaces de poursuivre Moscou devant la Cour pénale internationale (CPI), la surenchère de nos médias qui font du Poutine Bashing leur sport favori et la présentation totalement partiale du conflit syrien, le président russe a décidé d’annuler sa visite dans notre pays, jugeant le contexte peu favorable à des discussions sereines. Cette décision semble avoir pris au dépourvu notre président qui pensait pouvoir tancer son homologue russe sans que celui-ci ne réagisse, puis sans doute l’accueillir pour lui faire la leçon.
Une perception des faits totalement orientée
Il n’est pas question de faire l’apologie de Vladimir Poutine ou de Bachar El-Assad, ni de nier que la guerre tue, à Alep ou ailleurs ; mais il est bon de rétablir certaines vérités qui sont délibérément dissimulées par les stratèges de la communication américains et les médias Mainstream à leur service.

Depuis qu’ils sont devenus l’unique superpuissance, les Etats-Unis n’ont cessé de prendre des libertés vis-à-vis du droit international. Pourtant, rares ont été les médias à dénoncer leurs méfaits et les ONG ou les Etats les ayant menacé de poursuites juridiques internationales ou déclaré qu’ils en porteraient la responsabilité devant l’histoire. Rappelons quelques faits :
– l’invasion illégale de l’Irak – passant outre le véto de la ONU -, laquelle a permis la naissance de Daesh et a provoqué la mort et la désolation dans ce pays, faisant plus de victimes encore que la dictature de Saddam Hussein. Cette action a tout autant violé le droit international que l’action russe en Crimée ;
– les nombreuses victimes collatérales des frappes de drones dans le cadre de la Global War on Terrorism (GWOT)[3] ;
– la légalisation la torture et la multiplication des arrestations extra-judiciaires (Rendition) et des prisons secrètes dans le cadre de la GWOT ; la généralisation de l’espionnage de leur population et de leurs alliés. Pourtant ni l’une ni l’autre de ses mesures n’ont été d’une grande efficacité dans la lutte contre le terrorisme ;
– le soutien à l’Arabie saoudite et au Qatar – deux Etats qui exportent leur islam radical archaïque dans le monde et soutiennent les djihadistes -, à la confrérie des Frères musulmans – dans le cadre du « printemps arabe » – et aux djihadistes liés à Al-Qaïda pour renverser le régime syrien.
Mais les Etats-Unis ne sont pas les seuls dans ce cas. Ces pratiques concernent aussi plusieurs de leurs alliés.

L’Arabie Saoudite, non contente d’exporter le wahhabisme de par le monde et d’avoir soutenu les djihadistes, est intervenue au Bahrein à l’occasion du printemps arabe (2011) pour mater une révolte populaire sans que personne ne s’en offusque. Elle semble pourtant incapable d’assurer la sécurité des pélerins se rendant à La Mecque pour le hadj, ainsi qu’en témoignent les incidents à répétition survenus ces dernières années ayant entrainé la mort de centaines de croyants. Surtout, depuis dix-huit mois, elle a déclenché une guerre sanglante au Yémen (opération Tempête décisive), laquelle semble ne pas intéresser grand-monde, contrairement au conflit syrien.
Depuis mars 2015, une coalition internationale[4] menée par Riyad s’attache à remettre au pouvoir le gouvernement d’Abd Rabo Mansour Hadi, afin d’empêcher l’installation d’un régime chiite à sa frontière méridionale. Dans ce conflit, les Saoudiens sont aidés par les Etats Unis qui leur fournissent armement, renseignements et ravitaillent leurs avions. Les combats ont déjà provoqué plus de 10 000 morts dont beaucoup de civils. L’Arabie saoudite bombarde systématiquement les infrastructures du pays – y compris les hôpitaux – et exerce un blocus sur les zones rebelles au point que des millions de Yéménites n’ont plus de quoi se nourrir ; trois millions ont fui les zones de combat. Le 8 octobre dernier, les avions saoudiens ont pris pour cible une cérémonie funéraire à Sanaa, tuant au moins 140 personnes et en blessant 500. Ces frappes relèvent pleinement d’un crime de guerre ; pourtant aucun Etat occidental ne l’a signalé ni n’a protesté. Tout juste les Américains ont-ils fait savoir qu’ils allaient reconsidérer leur soutien aux Saoudiens dans ce conflit.

A noter également que plusieurs milliers de véhicules Toyota ont été achetés par les pays du Golfe (Arabie saoudite, Qatar, Émirats arabes unis et Jordanie) pour être livrés à l’État islamique, en Syrie et en Irak. C’est le constructeur japonais, accusé à tort de commercer avec Daesh, qui a révélé la liste de ses principaux clients dans la région. Ainsi, 22 500 véhicules auraient été vendus aux Saoudiens, 32 000 aux Qataris et 11 650 aux Emiratis. Puis, selon des informations provenant des services russes – à considérer naturellement avec circonspection -, l’armée jordanienne aurait facilité le transfert de ces véhicules en Syrie et en Irak. Une fois encore, les dénonciations de ce soutien des monarchies pétrolières à l’Etat islamique, sont rares.

La Turquie est dirigée par un président membre de la confrérie internationale des Frères musulmans, qu’il a soutenu en Tunisie, Libye, Egypte et Syrie à l’occasion des « printemps arabes ». Erdogan a aussi longtemps laissé à Daesh la libre utilisation de son territoire pour son approvisionnement et ses opérations en Syrie et en Irak. Par ailleurs, il ne cesse de renforcer son pouvoir personnel – dans le but de devenir président à vie – et d’encourager l’islamisation de la société. A la suite d’une tentative avortée de coup d’Etat contre lui[5], il s’est livré à une gigantesque purge afin de liquider ses opposants et d’installer ses affidés. C’est-à-dire que l’un des pays membre de l’OTAN est dirigé par un islamiste radical aux tendances despotiques, bafouant les droits de l’homme, sans que cela ne choque personne ni ne remette en cause notre politique à l’égard d’Ankara. Et l’on parle toujours d’une éventuelle entrée de la Turquie dans l’Union européenne… Rappelons également, les forces turques ont pénétré illégalement dans le nord de la Syrie et de l’Irak et occupent une portion du territoire de ces deux Etats sans que la communauté internationale ne trouve à y redire.

Les faits ci-dessus montrent sans ambigüité que le droit international est, depuis quinze ans, davantage bafoué par Washington et ses obligés que par Moscou ou Damas ; et que les victimes civiles du « camp de la liberté » sont tout aussi innocentes et bien plus nombreuses que celles qui tombent lors des opérations russo-syriennes. Mais dès lors que des actions de force sont américaines ou alliées de Washington, elles sont, par essence, « justes, légitimes et utiles ». Seuls ceux qui n’appartiennent pas à ce camp ou qui ne soutiennent pas cette politique sont coupables : Moscou, Damas, Téhéran, etc.
Il faut le réaffirmer sans cesse : contrairement aux idées reçues, la société de l’information dans laquelle nous vivons n’a que très marginalement permis d’améliorer la qualité et l’objectivité des données à la disposition du public. Au contraire, en dépit de la multiplication des canaux médiatiques, leur concentration entre les mêmes mains permet encore davantage de manipulation des faits qu’avant son émergence. Les événements actuels en sont la flagrante illustration.
La provocation délibérée du Russian Bashing
Pour envenimer la situation, dirigeants politiques, responsables militaires et journalistes occidentaux ne cessent d’évoquer la montée en puissance de la menace russe et le retour d’une nouvelle Guerre froide… voire pour certains, le spectre d’une nouvelle guerre mondiale[6] !
Mais le Russian Bashing impulsé par les milieux anglo-saxons ne reflète pas la réalité. Rappelons que le budget de la défense des Etats-Unis (près de 600 milliards de dollars) est de très loin le premier au monde et qu’il est supérieur aux budgets cumulés des dix pays qui le suivent ; la Russie (avec un budget de moins de 70 milliards de dollars) n’arrive elle-même que loin derrière la Chine et l’Arabie saoudite. Moscou dépense ainsi pour sa défense huit fois moins que Washington. La « menace » doit donc être fortement relativisée. Elle est pourtant largement utilisée par Hillary Clinton dans le cadre de sa campagne présidentielle, comme si elle cherchait par avance à remettre en cause une éventuelle victoire de Donald Trump… avec le soutien des hackers russes !
Il convient également de réfuter la soi-disant volonté hégémonique de Moscou. Poutine n’a d’autre but que de mettre fin aux humiliations répétées dont son pays a été victime depuis vingt ans et au grignotage de ses marges. Il n’accepte plus sans réagir que la Russie soit provoquée ou que ses intérêts soient bafoués. Pourtant, c’est aujourd’hui Moscou qui apparaît comme « fauteur de troubles ».
A l’opposé, il faut être aveugle pour ne pas mesurer le comportement impérialiste croissant de Washington, tant par ses interventions extérieures qui ne résolvent rien, que par l’application extraterritoriale de son droit au monde entier.

Bien sur, il ne fait aucun doute que de tels propos seront immédiatement qualifiés de « pro Poutine » et que leur auteur sera accusé d’être un relais de l’influence russe. En effet, c’est une technique régulièrement utilisée ces dernières années que de mettre systématiquement en doute l’objectivité et l’indépendance de ceux qui critiquent la politique Mainstream. Ainsi, les médias nous rebattent régulièrement les oreilles au sujet des réseaux d’influence russes en France – ce qui est une réalité, tout comme l’espionnage de Moscou -, mais sans jamais parler des réseaux d’influence et d’espionnage infiniment plus puissants des Américains
Nous vivons une période difficile dans laquelle les esprits sont l’enjeu des stratégies des uns et des autres et où les médias sont devenus un véritable champ de bataille. En la matière, par leur maîtrise des canaux de communication mondiaux, les Etats-Unis disposent d‘un net avantage ; ils ont réussi à imposer leur vision du monde, laquelle répond à la promotion et la défense de leurs intérêts… mais en rien à ceux de la démocratie ni de l’Occident – et surtout pas de la France. Ils ont également réussi à convaincre que leur point de vue était « la » vérité objective et que tous ceux qu’ils désignent comme leurs adversaires sont le « mal ». Evidemment, la réalité est quelque peu différente. Mais nos élites ne semblent pas le percevoir.
Pour nous Français, l’enjeu n’est pas Moscou, Damas ou Alep, ni Poutine ou Bachar. Il est de retrouver une indépendance de vue et une objectivité d’analyse que nous avons abandonnées depuis plus d’une décennie et d’échapper à la vision sectaire du monde qu’imposent les Américains.
D’autant plus qu’à la différence des Britanniques, nous ne reconnaissons ni ne cherchons à analyser nos erreurs. Le parlement du Royaume Uni a publié, en juillet et  en septembre dernier, deux rapports remettant en cause la décision de David Cameron d’intervenir en Libye, jugeant que les informations l’ayant conduit à lancer cette opération étaient infondées. Qu’avons nous fait en France ? Strictement rien ! Interviewé par la presse, Nicolas Sarkozy a persisté, déclarant qu’il avait pris alors « la bonne décision ».

*

La très grande majorité des spécialistes de géopolitique, des relations internationales et des diplomates nous répètent à l’envi depuis un quart de siècle que le monde a changé. Certes. Cela est indéniable. Nous le mesurons chaque jour.
Ce qui n’a pas changé en revanche, c’est la grille de lecture sur laquelle ils fondent leur analyse. Elle est restée, pour l’essentiel, basée sur des critères d’évaluation datant de la Guerre froide : le bien, la vérité et la justice sont américains ; le mal, le mensonge et l’injustice demeurent russes ou iraniens. D’où leurs jugements erronés et leurs conseils inadaptés pour la conduite des politiques étrangères européennes… et les erreurs à répétition de celles-ci.
Le monde évolue donc plus vite que les analyses qu’en font ces « experts » et les choses ont changé de manière bien plus profonde qu’ils ne l’observent, même si des constantes demeurent. C’est pourquoi il est nécessaire d’adopter une nouvelle lecture de la situation internationale afin d’essayer de redonner à la France – et plus largement l’Europe – la boussole dont elle semble démunie.
Seule lueur de lucidité dans ce sombre tableau, le remarquable rapport récemment publié par les députés Pierre Lellouche et Karine Berger, relatif à l’application extraterritoriale du droit américain[7]. Voilà enfin une réflexion de fond sur un sujet stratégique pour notre économie et nos entreprises, auquel le gouvernement ne s’est guère intéressé, en dépit des affaires BNP et ALSTOM. A lire absolument.

[1] Il convient également de rappeler que depuis cinq ans la population fidèle au régime n’a cessé d’être ciblée par les djihadistes : coupures d’eau et d’électricité, bombardements, blocus du ravitaillement, assassinats, enlèvements, tortures…
[2] Voir à ce sujet l’excellente analyse de Richard Labévière : http://prochetmoyen-orient.ch/mossoul-alep-la-diagonale-du-fou/
[3] Outre les frappes de drones – qui créent plus de terroristes qu’elles n’en éliminent – ces frappes ont eu lieu à plusieurs reprises en Afghanistan à l’occasion fêtes de mariage, faisant chaque fois une centaine de victimes civiles. Rappelons également que les forces aériennes américaines ont bombardé, le 3 octobre 2015, un hôpital à Kunduz, en Afghanistan, faisant 42 morts et 37 blessés, parmi lesquels des membres Médecins sans frontières ; et qu’elles ont tué une centaine de soldats syriens, mi-septembre 2016, dans un bombardement effectué « par erreur », ce qui a par ailleurs permis à Daesh de s’emparer d’une position stratégique.
[4]  Elle comprend une dizaine de pays arabes et sunnites : les membres du Conseil de coopération du Golfe (Oman excepté), le Maroc, la Jordanie, le Soudan et l’Egypte.
[5] La genèse de cet événement n’est toujours pas claire. De fortes suspicions existent quant à la parfaite connaissance de ce complot par Erdogan, qui pourrait avoir laissé faire afin de procéder à une purge radicale dans tous les domaines de l’appareil d’Etat.
[6] Cf. Alain Rodier, « Autour des conflits syriens et irakiens : Etats-Unis et Russie, ils sont tous devenus fous ! », Note d’actualité n°456, http://www.cf2r.org, octobre 2016.
[7] Pierre Lellouche et Karine Berger, Rapport d’information des commissions des Affaires étrangères et des Finances sur L’Extraterritorialité de la législation américaine, Assemblée nationale, Paris, 5 octobre 2016.

François Hollande, une déchéance française

par Bruno Guigue

17 octobre 2016

Source : http://arretsurinfo.ch/francois-hollande-une-decheance-francaise-par-bruno-guigue/

hollande-dijon-cote-or-23-juillet-2015

Le 8 octobre, alors que les combats faisaient rage à Alep, le projet de résolution présenté par la France a été rejeté par le Conseil de sécurité de l’ONU. La Russie et le Vénézuéla ont voté contre. La Chine et l’Egypte se sont abstenues. François Hollande déclara avant le vote que le pays qui opposerait son veto à la proposition française serait « discrédité aux yeux du monde » et que les responsables de « crimes de guerre » seraient déférés devant la Cour pénale internationale. Trois jours plus tard, François Hollande manifesta publiquement son « hésitation » à recevoir Vladimir Poutine à Paris. Moscou préféra reporter cette rencontre, attendant que M. Hollande soit « prêt ».

Cette initiative mort-née, suivie de cette palinodie ridicule, est un excellent résumé de la politique de gribouille qui tient lieu de diplomatie à la France hollandienne. Repoussant les propositions d’amendement présentées par Moscou, Paris ne pouvait ignorer que son projet de résolution finirait à la poubelle. Ce texte surréaliste demandait l’arrêt des frappes aériennes russes et syriennes, mais ne mentionnait pas la violence exercée par le camp adverse, lourdement armé et généreusement financé par des puissances étrangères en violation flagrante du droit international. Coup d’épée dans l’eau, cette initiative témoignait d’une agitation stérile et sans issue.

Volant au secours de ses protégés en mauvaise posture, la politique française faisait alors une double démonstration. Elle manifestait d’abord une hypocrisie sans limite en jouant du violon à propos des victimes civiles d’Alep-Est tout en fermant les yeux sur celles d’Alep-Ouest. Il faut croire que selon la situation géographique, les considérations humanitaires subissent de mystérieuses variations. A Paris, on fait volontiers le tri parmi les victimes. Les bonnes sont du côté des milices takfiries, les mauvaises du côté du gouvernement syrien. Orchestrée sur commande à chaque défaite djihadiste, cette indignation sélective est devenue une véritable spécialité française.

La deuxième démonstration faite par la diplomatie française est celle de son alignement pavlovien sur Washington. Au moment où les matamores galonnés du Pentagone menacent la Russie d’un conflit nucléaire, Paris fulmine contre Moscou. La propagande anti-russe se déchaîne aux USA, et M. Hollande ne veut pas être en reste. Tel un roquet teigneux, il aboie en faisant mine de mordre l’ours russe aux mollets et détale lorsqu’il se retourne. Une fois de plus, le suivisme atlantiste du président français atteint des sommets et défie l’imagination. Faute d’en avoir lui-même, le président français colle à la politique US dans ses méandres les plus sinueux et s’y perd sans qu’on s’en aperçoive.

Cette pitoyable servilité du président actuel n’est pas nouvelle. En février 2014, Barack Obama et François Hollande signaient une tribune parue simultanément dans « Le Monde » et le « Washington Post ». A la fin de ce texte insipide, véritable filet d’eau tiède qui débitait les poncifs de la doxa occidentale, on pouvait lire : « Pendant plus de deux siècles, nos deux peuples ont fait front pour défendre notre liberté commune. A présent, nous assumons, une fois encore, nos responsabilités, non seulement l’un envers l’autre, mais envers un monde qui est plus sûr grâce à la pérennité de notre alliance aujourd’hui réaffirmée ».

Avec 50% des dépenses militaires mondiales, 725 bases militaires à l’étranger et une doctrine militaire qui autorise la première frappe nucléaire, qui pourrait nier que les Etats-Unis d’Amérique œuvrent à la paix mondiale et à la concorde universelle ? Heureusement, grâce à M. Hollande, ils ne sont plus seuls à apporter la lumière au monde ébahi devant tant de générosité. Phare de l’humanité, la grande nation au « destin manifeste » sait désormais qu’elle est fidèlement secondée, pour accomplir cette tâche grandiose, par un nouvel auxiliaire à la fidélité de caniche.

Joignant le geste à la parole, François Hollande n’a cessé de se comporter en supplétif de Washington. Dans son enthousiasme à servir une puissance qu’il croit invincible, il a toutefois perdu le sens des réalités. Décidé à bombarder un Etat souverain qui n’a jamais agressé la France, il joua obstinément le boute-feu en Syrie. Heureusement, il fut refroidi pour de bon par l’initiative diplomatique russe. Puis il endossa le rôle du redresseur de torts face à l’Iran. Peine perdue. En dépit de ses efforts, M. Fabius ne put empêcher l’accord sur le nucléaire. Dans les deux cas, cette attitude de volaille en furie qui montre ses ergots n’aboutit à rien. La décision est venue d’ailleurs. Paris l’a entérinée. Et la diplomatie française apparut comme un vieux souvenir.

Elle exista pourtant en d’autres temps. En 1966, le général de Gaulle avait extrait les forces françaises du commandement intégré de l’OTAN pour redonner à la France son indépendance stratégique. Prônant un monde multipolaire, il entendait conjurer les affres de la guerre froide. Le sort du monde était suspendu à l’affrontement entre les blocs, les USA embourbés au Vietnam, le Tiers Monde en effervescence. L’affirmation de la souveraineté française visait à desserrer l’étreinte des impérialismes de tous bords. Cette époque est révolue. Avec de Gaulle, la France était contre les empires. Aujourd’hui, la France est une colonie de l’Empire.

Adhérant à Washington comme l’huître au rocher, la présidence actuelle a abdiqué toute ambition. Jetant aux orties l’héritage gaulliste, Nicolas Sarkozy avait replacé les forces françaises sous commandement US. Nouveau fossoyeur, François Hollande jette à son tour une dernière pelletée de terre sur la souveraineté française. Le 7 avril 2016, l’Assemblée nationale a voté à sa demande la ratification du protocole de Paris, un texte qui entérine la réintégration de la France dans l’organisation militaire de l’OTAN et autorise la construction sur le territoire national de ces bases US que le général de Gaulle avait fait démanteler.

Complices sur toute la ligne, MM. Hollande et Obama ont beaucoup d’amis communs. Protégée des USA depuis 1945, la pétromonarchie saoudienne est pour François Hollande un « partenaire de référence » au Moyen-Orient. Paris a signé avec Riyad des contrats d’équipement militaire pour plusieurs milliards de dollars. L’Arabie saoudite est son premier client pour la période 2010-2015. La France livre aux Saoudiens des armes sophistiquées avec lesquelles ils massacrent la population yéménite. Cela ne suffit pas. Sans vergogne, l’Elysée distribue des médailles aux dirigeants d’un pays qui finance ce terrorisme qui frappe régulièrement la population française. Mais M. Hollande n’en a cure. Ce n’est pas sa priorité.

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Benyamin Nétanyahou accueillant François Hollande et sa compagne Valérie Trierweiler à Tel Aviv, le 17 novembre 2013. REUTERS

Appendice colonial de l’Occident et porte-avions US, Israël bénéficie aussi des faveurs empressées de la présidence française. La colonisation à outrance et la répression en Palestine occupée n’empêchent pas François Hollande de proclamer son soutien sans faille à l’Etat hébreu. A l’instar de son premier ministre éternellement lié à Israël, le président français se déclare « l’ami d’Israël pour toujours » (novembre 2013). Une promesse qui sonne étrangement au moment où le ministre des affaires étrangères israélien parle de « décapiter à la hache » tous ceux qui s’opposent à ses desseins. Peu importe. Tel Aviv est satisfait des services de l’Elysée. C’est l’essentiel.

Contre les dirigeants saoudiens et israéliens, Paris ne brandira jamais la menace de la Cour pénale internationale. La France ne réclamera pas de « right to protect » en faveur des enfants palestiniens et yéménites. Elle n’exigera pas de « no fly zone » pour mettre hors d’état de nuire les bombardiers de Riyad et de Tel Aviv. Vu de Paris, le droit international humanitaire est toujours à géométrie variable. C’est une arme d’intimidation massive dont on use au gré des intérêts de l’Empire. Quand les dirigeants français invoquent les droits de l’homme, c’est pour la galerie. Et l’on doit assister au spectacle de ces supplétifs qui apportent leur misérable contribution à la stratégie du chaos décidée à Washington.

Bruno Guigue | 16 octobre 2016

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Bruno Guigue, ex-haut fonctionnaire, analyste politique et chargé de cours à l’Université de La Réunion. Il est l’auteur de cinq ouvrages, dont Aux origines du conflit israélo-arabe, L’invisible remords de l’Occident, L’Harmattan, 2002, et de centaines d’articles.

Photo: D.R.

Source: http://arretsurinfo.ch/francois-hollande-une-decheance-francaise-par-bruno-guigue/

Les médias occidentaux ont fait « disparaître » plus de 1,5 millions de Syriens et 4000 médecins

par Eva Bartlett

Source : http://lesakerfrancophone.fr/les-medias-occidentaux-ont-fait-disparaitre-plus-de-15-millions-de-syriens-et-4000-medecins

25 octobre 2016

Source originale :

https://www.sott.net/article/325238-Western-corporate-media-disappears-over-1-5-million-Syrians-and-4000-doctors

14 août 2016

alep-hopital-3La maternité Al-Dabbhet, dans la partie ouest d’Alep tenue par le gouvernement, a été bombardée le 3 mai

par les groupes terroristes

 

Alors que l’armée arabe syrienne et le gouvernement syrien progressent dans le rétablissement de la sécurité à Alep, dans le nord de la Syrie, les organisations de droits de l’homme se présentant comme neutres, alors qu’ils font de la propagande de guerre, et les médias occidentaux (et leurs homologues du Golfe comme Al Jazeera) ressortent leurs accusations et leurs déclarations mensongères.

 

Selon ces ONG financées par les gouvernements occidentaux, George Soros et la plupart des médias, il n’y a plus qu’un «dernier» pédiatre et un petit nombre de médecins restant à Alep. Ils se réfèrent, bien sûr, uniquement aux régions d’Alep occupées par les terroristes (l’Est et certains quartiers nord) et ignorent le fait que le gouvernement syrien continue de payer les salaires des médecins dans les zones occupées par les terroristes, y compris l’est d’Alep.

 

Cette affirmation de «dernier pédiatre»(*) a été mise en avant cette année dans le cadre d’une frénésie médiatique tentant de dénigrer la Syrie et la Russie comme «ciblant les civils» (alors qu’en fait, ce sont les terroristes soutenus par l’étranger qui sont ciblés). Ces hyènes médiatiques et des droits de l’homme ont ignoré les réalités suivantes sur Alep :

  • La présence de terroristes (Jabhat al-Nusra, et ce que l’Occident appelle les «modérés» – Ahrar al-Sham, Jaysh al-Fateh, Nour al-Din al-Zenki, et les factions de la soi-disant Armée syrienne libre) dans l’est et dans le nord d’Alep.
  • La présence de plus de 1,5 million de civils dans la partie d’Alep-ouest sécurisée par le gouvernement, qui sont assassinés et mutilés chaque jour par des terroristes tirant des roquettes, des missiles, des mortiers et des munitions, ainsi que des balles explosives provenant d’Occident ou de Turquie, et des bidons et des mortiers farcis de bonbonnes de gaz, fabriqués localement.
  • La présence, dans la partie d’Alep sécurisée par le gouvernement, de civils venant des zones occupées par les terroristes – dont beaucoup ont, dès 2012, fui l’afflux de terroristes dans leurs districts; d’autres qui, au fil des ans, ont depuis fui à l’ouest, et un petit nombre d’entre eux qui ont récemment été en mesure de fuir par les couloirs humanitaires reliant l’est à l’ouest d’Alep.
  • La présence de 4 100 médecins (source : Association médicale d’Alep) et de nombreux hôpitaux fonctionnant à Alep – en dépit des sanctions pénales occidentales contre la Syrie et des hôpitaux détruits par les bombardements des terroristes.
  • Le fait que les terroristes dans Alep-set sont essentiellement non syriens (et non pas des «rebelles»), venant «de quatre-vingt-un pays différents avec des contingents importants venant de Turquie, des pays arabes du Golfe, d’Afrique du Nord, de Tchétchénie et de la région du Nord-Caucase russe». [Source: 10 Faits sur Alep]
  • Et qu’au moins 80% des terroristes sont affiliés à al-Qaïda et que la majorité des autres suivent de toutes façons les mêmes impitoyables idéologies. [Source: 10 Faits sur Alep]

 

 

Les médecins d’Alep réfutent les mensonges des médias

alep-ouest-3Bombardements attribués aux « rebelles modérés » frappant la partie de la ville d’Alep-ouest

que la presse occidentale ignore

Début juillet 2016, je me suis rendue en voiture à Alep. En entrant dans le quartier sud de Ramouseh, la voiture a accéléré le long d’une route connue pour être la cible des snipers terroristes. Trois semaines plus tard, au même endroit, une femme a été visée par un terroriste et tuée.

 

A Alep, j’ai rencontré des médecins de l’Association médicale d’Alep (créée en 1959), y compris le Dr Zahar Buttal, le Dr Tony Sayegh, et le Dr Nabil Antaki.

 

Une question que j’ai posée aux médecins concernait le mensonge, maintes fois répété, du «dernier pédiatre» à Alep (**), une allégation surprenante – n’ayant aucun rapport avec la vérité – conçue pour choquer le public occidental et le retourner contre le gouvernement syrien.

 

Le Dr Zahar Buttal, président de l’Association médicale d’Alep, a réfuté ces allégations, soulignant qu’Alep disposait encore de 180 pédiatres en activité dans la ville. Au sujet du seul pédiatres prétendu restant à Alep-Est, il a déclaré : «Les médias disent que le seul pédiatre d’Alep a été tué dans un hôpital appelé al-Quds. En réalité, c’était un centre de soin non enregistré.» En ce qui concerne le pédiatre, «nous avons vérifié le nom du médecin et n’avons pas trouvé d’inscription dans les registres de l’Association médicale d’Alep».

 

En effet, l’hôpital al-Quds en question était au cœur de la frénésie de mensonges médiatiques concernant Alep, le gouvernement syrien et ses alliés russes. Les revendications autour du bâtiment appelé l’hôpital al-Qods se contredisent les unes les autres.

 

Au centre des mensonges on trouve les propos biaisés et la propagande de la très partiale organisation Médecins Sans Frontières, qui intervient uniquement dans les zones de Syrie sous le contrôle des groupes terroristes, en particulier Jabhat al-Nusra (dont la tentative de rebranding – Jabhat Fatha al-Sham – a échoué, car elle n’oblitère pas leur lien avec al-Qaïda, ni n’efface leurs crimes).

 

La prochaine question aux médecins fut : si la zone d’Alep sécurisée par le gouvernement dispose de 180 pédiatres, quel est le nombre total de médecins qui travaillent encore là-bas ? En effet, les mensonges médiatiques ont affirmé, pendant des mois, que le nombre de médecins est en baisse; même un article de juillet de The Intercept affirmait que «le nombre de médecins à Alep a chuté jusqu’à une petite dizaine. Le nombre de médecins spécialistes restants est encore plus faible».

 

Pourtant, selon le Dr Zahar Buttal, il y a jusqu’à présent 4 160 médecins inscrits et actifs dans la ville d’Alep, dans la zone gouvernementale regroupant plus de 1,5 millions de personnes. Sur les 4 160 médecins, 200 nouveaux médecins ont été enregistrés depuis le début de cette année.

 

En ce qui concerne les affirmations médiatiques prétendant un manque de spécialistes à Alep, en plus des 180 pédiatres mentionnés, il y a bien sûr beaucoup d’autres spécialistes à Alep. Selon le Dr Zahar de l’Association médicale d’Alep, les spécialistes qui pratiquent encore dans la ville comprennent:

 

30 chirurgiens cardiovasculaires

214 chirurgiens généralistes

112 orthopédistes

11 pneumologues

12 neurologistes

8 neurochirurgiens

250 obstétriciens/gynécologues

15 gastro-gastro-entérologues.

 

Dr. Nabil Antaki, lui-même gastro-entérologue, fait partie d’un groupe de 15 médecins spécialistes qui, depuis la fin de 2012, se sont portés volontaires et ont soigné dans les hôpitaux privés (avec l’équipement et les frais médicaux minimum) plus de 500 civils grièvement blessés par les bombardements terroristes, nécessitant des soins spécialisés. Les spécialistes de son seul groupe comprennent : trois chirurgiens généralistes, un chirurgien cardiaque, un neurochirurgien, deux chirurgiens orthopédistes et trois anesthésistes.

 

Le Dr Antaki a été direct au sujet de la couverture par les médias occidentaux sur Alep. Lorsque la campagne créée par les médias occidentaux, «Alep brûle», a pris son envol fin avril – le moment exact où les terroristes soutenus par l’Occident ont intensifié leurs bombardements quotidiens sur Alep. Le Dr Antaki, qui a pu voir le pire des victimes et des attentats, en a parlé.

 

Quand je l’ai rencontré en juillet 2016, le Dr Antaki a continué à se faire entendre au sujet des manipulations médiatiques flagrantes et au sujet de la réalité de terrain à Alep.

 

«Toutes les campagnes qui ont été lancées par les médias occidentaux concernent la partie est d’Alep, celle qui est contrôlée par les «rebelles». Tous les médias ont rapporté que les habitants y souffrent, les bâtiments sont détruits et que le gouvernement syrien y perpétue des «crimes de guerre». Mais, ce que nous endurons dans la partie contrôlée par le gouvernement syrien est bien pire que dans la partie est. Personne ne parle de ce qui se passe dans la partie ouest d’Alep. Il n’y a pas seulement des dizaines de mortiers chaque jour qui tombent sur la partie ouest d’Alep, mais des centaines, et chaque jour, nous avons des centaines de personnes tuées ou blessées et personne n’en parle. Quand les médias ont parlé d’un soit disant hôpital détruit dans la partie orientale, une semaine plus tard, la principale maternité d’Alep a été frappée par les bombes envoyées par les «rebelles», et des femmes ont été tuées, et personne [aucun média, NdT] n’en a parlé. »

 

Dr. Tony Sayegh d’Alep s’est également fait entendre au sujet de la flagrante partialité des médias à propos d’Alep. En juillet, au sujet de l’hôpital Qods et de la propagande autour de ce sujet, le Dr Sayegh m’a dit :

 

«Cet hôpital, dans le quartier Sukkari, ils en ont fait une grande propagande parlant du «dernier médecin dans cette zone», ce qui est absolument faux. Le gouvernement a des médecins qui travaillent dans cette zone et qui reçoivent leurs salaires du gouvernement, même si la zone est contrôlée par des terroristes. Pour le gouvernement, toutes les zones et leurs habitants sont Syriens. Les zones où il y a des terroristes, comme al-Manbij, comme al-Bab, dans toutes ces zones, il y a beaucoup de médecins qui travaillent avec le ministère de la Santé, et ils reçoivent leurs salaires du ministère de la Santé. »

 

Des dizaines de milliers de morts et de blessés d’Alep absents des grands titres des médias

alep-hopital-al-kindiPhoto du grand hôpital d’Alep-ouest détruit par les terroristes d’al-Nosra en décembre 2013.

Dr. Nabil Antaki a donné le résumé suivant de la vie quotidienne pour les civils de la partie d’Alep sécurisée par le gouvernement, de la mi-2012 jusqu’à notre réunion de juillet 2016.

 

Depuis Juillet 2012, la zone principale d’Alep est quotidiennement bombardée par des mortiers, des bombes et des bonbonnes de gaz, envoyés par les «rebelles» sur les civils vivant à Alep. Ici nous avons des dégâts humains plus importants que là bas, mais une destruction physique moindre, parce qu’ici nous recevons des mortiers et des bombes à cartouche de gaz. Si un mortier frappe un bâtiment, il peut faire un trou de la taille d’une fenêtre, mais aussi tuer cinq personnes à la fois. Dans la partie d’Alep sous le contrôle du gouvernement, chaque jour, nous avons des dizaines de blessés et tués.

 

À la fin avril 2016, les terroristes des quartiers occupés de l’est d’Alep, ainsi que des districts de Beni Zaid et des quartiers voisins aussi occupés, ont augmenté leurs campagnes de bombardement quotidiens de mortiers, d’explosifs à bonbonne de gaz (bonbonnes domestiques jusqu’à industrielles, bourrées de verre, de roulements à bille, d’éclats de métal), de balles explosives et de puissantes fusées fournis par l’étranger, de plusieurs dizaines jusqu’à plus d’une centaine par jour sur les zones fortement peuplées d’Alep garanties par l’État syrien.

 

Sur le bombardement accru, le Dr Nabil Antaki m’a dit :

 

«Habituellement, vous n’avez pas juste un mortier, vous avez une pluie de mortiers : dix, vingt, trente, et plus en quelques heures. Beaucoup de gens sont blessés en même temps. Lorsque les ambulances amènent les gens à l’hôpital public, peut-être vingt ou trente personnes arrivent en même temps. Les hôpitaux publics manquent de suffisamment de personnel et de matériel médical. Donc, si vous avez dix personnes gravement blessés qui arrivent en même temps à l’hôpital public, le temps que les soins arrivent, une victime a le temps de mourir.»

 

Dans son bureau de l’Association médicale d’Alep, le Dr Zaher Buttal lit ses statistiques journalières sur la campagne de bombardements terroristes de la fin avril / début mai :

 

23 avril: 81 martyrs (morts), 30 blessés.

28 et 29 avril : jours les plus sanglants. 31 martyrs, 75 blessés ** chiffres initiaux seulement.

23 au 30 avril : 120 martyrs, plus de 800 blessés.

3 mai : 25 martyrs, 100 blessés (dont 3 femmes tuées dans l’explosion de la maternité al-Dabeet).

 

Bien que l’Association médicale d’Alep ait documenté le nombre quotidien de tués et blessés par cette campagne de bombardement intensifié, et bien que les zones attaquées comprennent un certain nombre d’hôpitaux enregistrés à Alep, les médias soutenus par les «groupes de droits de l’homme» et basés en Turquie, ou encore plus loin, ont préféré citer des «activistes anonymes» et les acteurs Casques blancs d’al-Qaïda, dans leurs reportages sur Alep.

 

Comme beaucoup (sinon la plupart) des résidents d’Alep, le Dr Zaher Buttal n’a jamais entendu parler des Casques blancs. Le fait que le chef de l’Association médicale n’ait pas connaissance de ce groupe, qui se présente comme les sauveurs des civils à Alep, souligne le fait qu’ils travaillent uniquement dans les zones occupées par les terroristes et pour les terroristes eux-mêmes. Pour plus d’informations sur le groupe terroriste de propagande qui est connu sous le nom de «Casques blancs», voir cette vidéo et cet article.

 

Par Eva Bartlett – 14 août 2016 – Sott.net

 

Traduit par Wayan pour le Saker Francophone

 

(*)  Nous avons encore de nombreux pédiatres à Alep. Cela montre que, pour les médias, seule compte cette partie d’Alep-Est occupée par les « rebelles », et que les trois quarts de la ville d’Alep-ouest administrée par l’Etat syrien, où pratiquent encore de nombreux pédiatres, ne comptent pas. [Dr. Antaki].

(**) Le conseiller spécial de l’ONU, Jan Egeland, a déclaré dans une conférence de presse, le 27 avril 2016) ; « le dernier pédiatre d’Alep a été tué« .  L’ONU n’a jamais rectifié cette fausse information abondamment relayée par les médias ? Cela montre le peu de sérieux de représentants onusiens censés avoir un point de vue équidistant.